- 

- 

Charlotte Godziewski 
Diététique à l’hôpital de Dhulikhel
  

Lundi 19 novembre 2012
  

Je suis arrivée à Dhulikhel il y a maintenant presque un mois, en plein Dashain, une grande fête d’une semaine entière, d’une importance comparable à notre Noël à nous. La première semaine de travail a été très légère! J’ai pu bénéficier d’un temps d’acclimatation en douceur et en festivité, avec des horaires très légères et décontractées. Je dois dire que ma première impression de l’hôpital a été très bonne, le personnel soignant est très rigoureux, appliqué, mais aussi accueillant et chaleureux. Tous les matins à 8h00 a lieu la réunion matinale lors de laquelle sont exposés les nouveaux cas et l’évolution de cas plus anciens.
Dès la deuxième semaine, mon travail a réellement commencé. Niveau nutrition, tout est à faire, l’hôpital ne dispose pas encore de service diététique. Seule une nutritionniste visite l’hôpital deux fois par semaine, et donne également des cours aux étudiants en infirmerie. Mise à part cela, rien n’a encore été mis en place. Je me suis donc trouvée, dès mes premiers jours, sollicitée aux quatre coins de l’hôpital. J’ai été très heureuse de constater l’intérêt et la curiosité que le personnel soignant porte à la nutrition.
Mon travail devra se faire sur 5 volets différents :
  

- Améliorer le niveau d’hygiène dans la cuisine de l’hôpital.
  

Pour cela, j’ai organisé une séance de sensibilisation destinée au personnel de cuisine. Cette séance était sensée amener les employés à un réflexion concernant des nouvelles mesures d’hygiène à prendre. J’étais agréablement suprise lorsqu’ils ont partagé de très bonnes idées, certains avaient même eu spontanément les mêmes idées que moi. Dès le lendemain, le chef de cuisine était très fier de me montrer la mise en œuvre de certaines de ces mesures. J’espère que cette motivation va durer et que le progès va continuer ! Mettre en place un système HACCP dans la cuisine de l’hôpital me semble illusoire, étant donné que le personnel ignore
même les bonnes pratiques d’hygiène. Mais je compte bien leur inculquer les règles d’hygiène les plus importantes, comme le lavage des mains, la séparation cuit/cru, sale/propre, la fermeture des moustiquaires pour éviter l’entrée de nuisibles...
  

- Etablir des régimes pour certaines pathologies, accessibles en cuisine
  

Ce projet est probablement un des plus délicats à réaliser. Je compte me concentrer sur 4 régimes à établir dans la cuisine de l’hôpital: Le régime hyperénergétique/hyperprotéiné, le régime diabétique, insuffisance rénale et liquide. Pour le régime liquide, je souhaiterai sensibiliser la direction à l’importance de se fournir en solution naso-gastrique disponible dans le commerce. Cela est beaucoup plus hygiènique, nutritionnellement plus complet, plus pratique pour les infirmières que des régimes liquides préparés en cuisine.
Il y a quelques jours, j’ai informé les infirmières ainsi que le personnel de cuisine au sujet d’un système que je souhaite mettre en place pour permettre aux patients concernés de reçevoir une alimentation adaptée. J’aimerais responsabiliser le personnel de cuisine, lui apprendre qu’ils ont un rôle important à jouer concernant le pronostic des patients. Pour cela, je les ai conviés à une présentation dans le grand hall de conférence et ils ont assisté à ma présentation sur l’importance de la diététique en milieu hospitalier. Je pense que le message est bien passé, ils semblent motivés à mettre en place un système de régimes adaptés, bien que la mise en pratique sera laborieuse : La distribution des repas se fait à partir d’un chariot sur lequel sont disposés les différents mets dans de grandes casseroles, le cuisinier sert les portions au fur et a mesure, dans les couloirs, et les donne aux membres de la famille des patients. Je souhaite intégrer un système de coupon, où la famille du patient requérant un régime spécifique pourra aller retirer son plateau à la cuisine.
  

- Préparer des régimes spécifiques
  

Plusieurs fois par semaine, je participe à la tournée des médecins. C’est l’occasion pour moi d’observer quels sont les différents cas présents qui auraient besoin d’un support nutritionnel. C’est également l’occasion de discuter avec les médecins de certains cas nécessitant une prise en charge diététique immédiate. Il m’arrive en effet d’être appelée par un médecin ou une infirmière, pour un cas particulier. Aujourd’hui encore, j’ai établi un protocol d’alimentation pour une fillette de 8 ans, grande brûlée suite à un accident pendant la célébration « Tihar ». Je souhaiterais néanmoins garder cette tâche-là marginale, car il me semble plus judicieux d’investir mon temps dans des projets à long terme, tels la mise en place de régimes adaptés au sein de la cuisine, l’éducation à la prise en charge diététique de certaines pathologies auprès du personnel soignant...
  

- Préparer les cours pour les étudiants en infirmerie... et le personnel
  

Ici encore, j’ai été vivement solicitée, à mon grand plaisir ! Une partie de mon emploi du temps sera réservé à la préparation de cours (total de 14h) au sujet de la déficience en vitamine A, la dénutrition protéino-énergétique, l’athérosclérose, le diabète, l’insufficence rénale, l’alimentation de la femme enceinte et celle du nouveau-né, et enfin les différences culturelles au niveau alimentaire.
La semaine dernière, j’ai eu l’occasion de présenter la prise en charge diététique des patients diabétiques de type 2 durant la conférence matinale. Je pense que le personnel infirmier ainsi que les médecins ont apprécié, car ils m’ont invitée à présenter d’autres sujets dans les mois à venir. Une présentation sur le dépistage et la prise en charge de la dénutrition sera ma grande priorité, car cela n’est encore nullement pratiqué dans cet hôpital, alors que le besoin est urgent !
  

- Préparer le projet «manger sainement» pour les dispensaires de Dhunkharka et Solambu
  

Dans quelques mois, j’aurai la chance de partir visiter deux des « Outreach Centers » de l’hôpital. Le responsable m’a délégué la mission passionnante de promouvoir l’alimentation équilibrée parmi les adolescents des villages. Il m’a en effet expliqué que la junk food commençait à atteindre même les villages, et que l’alimentation des adolescents se compose en grande partie de nouilles précuites (instant noodles) et de biscuits, que leur goûté n’est pas équilibré. J’ai carte blanche pour toute initiative et compte préparer un programme ludique et éducatif, renforcé par une brochure.
Comme on peut le constater, il y a du pain sur la planche, et, chaque matin je pars au travail avec le sourire et pleine de motivation. Il faut également préciser que je suis très bien encadrée, certaines infirmières ont eu la charge de m’aider en cas de souci, et je sais vers qui me tourner en cas de besoin. Parallèlement à cela, on me laisse une grande liberté dans mon organisation, ce qui me permet de mettre au point mon emploi du temps.
  

 
à suivre....